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Typhaine Actu
25 novembre 2014

La justice refuse de restituer à son père biologique un enfant né sous X.

La cour d’appel a refusé, mardi 25 novembre, de restituer au père biologique un enfant né sous X.

Yoan Delorme, le père biologique de Corentin, à Nantes, le 19 novembre.

Sur le bras gauche de Yoan Delorme est tatoué un prénom : Wendy. C’est celui de sa fille de 7 ans. Sur son bras droit, il y a simplement : « A mon fils ». Son fils, né sous X il y a 18 mois, qui vit avec un couple qu’il appelle papa et maman. Corentin (le prénom a été modifié à la demande de la famille adoptive) est le nom choisi par les services du conseil général de Loire-Atlantique pour cet enfant qu’ils croyaient sans filiation.

Yoan Delorme ne se fera pas tatouer ce prénom sur le bras. Il veut appeler son fils Brendon Patrice Dominique. Il attend de récupérer le petit pour le faire. « Les papiers sont prêts », affirme-t-il. Son avocate lui a pourtant expliqué que ce n’était pas possible.

« C’est mon fils, mon sang, j’ai tout l’amour d’un père pour lui », poursuit le jeune homme de 29 ans. Il n’a jamais vu l’enfant, mais il l’attend avec impatience et se dit prêt à le prendre avec lui du jour au lendemain. Sa nouvelle amie, elle, « a peur ». Yoan Delorme n’a pas envie de connaître la famille adoptive, mais il ne leur en veut pas. « L’erreur c’est pas eux, c’est le conseil général, dit-il. Au procès ils ont pleuré. C’est pas de ma faute. Moi, c’est mon fils, il faut qu’on me le rende. »

Mardi 25 novembre, la cour d’appel de Rennes a tranché, refusant la restitution au père biologique. Dans tous les cas, c’était un drame pour l’une des parties : pour le couple candidat à l’adoption si la cour d’appel confirmait la décision rendue en première instance en avril à Nantes, qui ordonnait la restitution de l’enfant au père – dans un courriel transmis par leur avocat, ils disent vivre « un enfer » en attendant la « terrifiante échéance » – ; pour le père biologique si elle l’infirmait, comme elle l’a décidée.

Pouponnière

Comment en est-on arrivé là ? « C’est une accumulation de petites choses qui a abouti à une catastrophe », résume Guillaume Le Maignan, l’avocat du couple adoptif. Passés les trois premiers mois d’une grossesse souhaitée, la compagne depuis quatre ans de Yoan Delorme ne lui donne plus signe de vie. Dès ce moment, il souhaite reconnaître l’enfant. L’acte sera enregistré à la mairie de Nantes trois jours après la naissance de Corentin, qui a lieu le 30 avril 2013. A l’époque, M. Delorme est en prison.

Le conseil général, de son côté, recueille un bébé né sous X et sans filiation paternelle. La mère est protégée par l’anonymat et ne dit pas qui est le père. L’institution n’a pas connaissance de la reconnaissance effectuée en mairie par M. Delorme. C’est au père de se manifester, soit auprès du conseil général, soit en saisissant le procureur de la République qui a le pouvoir de faire rechercher l’enfant, dans un délai de deux mois après la naissance.

Mais M. Delorme ne donne pas signe de vie pendant que l’enfant est en pouponnière. Il ne sait pas que sa compagne a accouché sous X. Son avocate Pauline Loirat tente de le localier en vain. Au bout de deux mois, le conseil général lance la procédure d’adoption.

Les candidats sont légion. Le 12 juillet 2013 à 9 heures, après une période d’adaptation, Corentin est confié à un couple d’une quarantaine d’années. Cela fait trois ans qu’ils attendent un enfant.

La coïncidence est dramatique : le même jour, 12 juillet, à 11 h 30, un fax de l’avocate de M. Delorme arrive au conseil général. Il affirme que ce dernier a reconnu l’enfant et demande que le petit ne soit pas placé en vue d’une adoption. Mais le père ne réclame pas son fils. C’est le nœud de l’affaire.

« A ce moment-là, nous ne savons pas qui est M. Delorme, où il est, ni quelles sont ses intentions, affirme Jean-Christophe Boyer, l’avocat du conseil général. Reconnaître un enfant ne veut pas dire qu’on va s’en occuper. S’il voulait l’enfant, il fallait le réclamer. Devions-nous tout arrêter en attendant qu’il dise ses intentions ? »

« L’intérêt de l’enfant »

Mais la demande de restitution de l’enfant ne sera faite qu’en octobre, et l’action en justice pour faire annuler la qualité de pupille de l’Etat en janvier 2014. Pour M. Delorme, le conseil général est allé trop vite. « Ils ne sont pas posés les bonnes questions », affirme Me Loirat. Selon le conseil général, c’est M. Delorme qui est allé trop lentement. « Dans un premier temps la famille biologique est prioritaire, renchérit Me Le Maignan. Ensuite la procédure d’adoption est lancée, et dans l’intérêt de l’enfant il ne faut pas revenir en arrière. »

L’arrêt de la cour d’appel de Rennes pourrait avoir des conséquences au-delà de cette affaire. « Si elle ordonne la restitution, qu’est-ce qui empêchera tous les pères qui apprennent tardivement qu’ils ont un enfant né sous X de venir le réclamer à leur famille adoptive ? », interroge Me Boyer.

Et Corentin ? Vaut-il mieux pour lui vivre avec son père, maisêtre arraché au milieu familial où il s’épanouit depuis 16 mois, en perdant au passage – à nouveau – une mère ? Ou rester dans la famille d’adoption, au risque d’avoir plus tard le sentiment d’avoir été enlevé à son père biologique, qui le réclamait ?

Le couple adoptif a consulté le meilleur de la pédopsychiatrie française. « Tous disent qu’un changement d’environnement serait dramatique pour l’enfant », affirme Me Le Maignan. Yoan Delorme, lui, est soutenu par les associations de défence des pères et les opposants à l’accouchement sous X.

 

 

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